Bienvenue

Ouvrez vous à l’espérance vous qui entrez dans ce blog !

Et ne vous croyez pas obligés d’être aussi puissants et percutants que Dante. Si vous avez eu plaisir à lire les lignes qui suivent et s’il vous est arrivé de passer d’agréables moments à vous remémorer des souvenirs personnels heureux de votre vie en Tunisie ; si vous éprouvez l’envie de les partager avec des amis plus ou moins proches, adressez les -- sous une forme écrite mais la voix sera peut-être bientôt aussi exploitable -- à l’adresse : jean.belaisch@wanadoo.fr et vous aurez au moins le contentement d’être lus à travers le monde grâce à l’internet et à ses tentacules.

Vous aurez peut-être aussi davantage c'est à dire que d’autres personnes, le plus souvent des amis qui ont vécu les mêmes moments viendront rapporter d’autres aspects de ces moments heureux et parfois corriger des défaillances de votre mémoire qui vous avaient fait prendre pour vérité ce qui était invention de votre cerveau émotionnel.

Ne soyez pas modestes, tout rappel peut être enrichissant, n’hésitez pas à utiliser votre propre vocabulaire, à manier l’humour ou le sérieux, les signes de richesse (y compris intellectuelle) ou les preuves de la pauvreté (y compris d’un moral oscillant). Vous avez toute liberté d’écrire à la condition que vous fassiez preuve de responsabilité puisque d’une façon ou d’une autre nous représentons tous un groupe de personnes qui a aimé la Tunisie et qui a pour d’innombrables raisons, choisi de vivre sur une autre terre.

Bienvenue donc et écrivez dès que vous en sentirez l’envie.


Un des responsables de ce qui pourrait aussi devenir un livre, si vous en éprouvez le désir !

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lundi 12 juillet 2010

Quand suis je venu en France ? par J-P Lellouche

Quand suis je venu en France ?
Jean-Pierre Lellouche

A cette question très simple je n’ ai jamais pu donner de réponse nette.
En septembre1961 j’ ai quitté La Goulette pour venir (mais à l’ époque je disais pour aller) à Paris. Après avoir fait mon PCB à Tunis j’ entrais en première année de médecine.
A cette époque je ne me demandais pas si j’ allais m’ établir en Tunisie ou en France j’ avais 17 ans et je ne me voyais pas « établi ».
Je rentrais chez moi, c’est à dire chez mes parents, aux vacances scolaires ,tous les étés et habituellement une fois de plus à Noël ou à Pâques.
Mes condisciples sachant que je venais d’Afrique du nord me considéraient souvent comme un « pied noir » ou comme un « rapatrié » ,j’essayais de leur expliquer qu’il n’ y avait pas la guerre chez moi que j’ étais venu faire mes études en France parce qu’il n’ y avait pas de possibilités de les poursuivre en Tunisie et que mes parents vivaient toujours en Tunisie. Mais je ne crois pas qu’ils aient vraiment compris , je ne crois pas non plus qu’ils aient eu envie de comprendre, je pense qu’ils avaient besoin de penser que le monde n’ est pas trop compliqué

En 1973 après avoir terminé mon internat puis mon clinicat j’ étais clairement et définitivement installé en France
Que s’ est il passé pour qu’un jeune de 17 ans venu en France pour faire ses études et n’ ayant en aucune façon le projet de s’ y établir (ni d’ ailleurs le projet de ne pas s’ y établir) devienne un citoyen français vivant en France et heureux d’ y vivre ?
Pour répondre à cette question il me faudrait prendre en considération l’ histoire de la Tunisie et l’ histoire du judaïsme tunisien ,il me faudrait aussi parler de l’ histoire de ma famille et de la maladie de mon père il me faudrait aussi parler de ma propre histoire.
Je voudrais simplement évoquer deux éléments :le premier est mon service militaire au titre de la coopération française en Tunisie, le second est ma difficulté à faire comprendre à des personnes qui se disent et se pensent « pro palestiniens » l’ histoire des Juifs de Tunisie.
Je commencerais par cette seconde question car la première y répond en partie
Certaines personnes dites pro palestiniennes ont une vision extraordinairement schématique des questions israélo palestiniennes. Elles pensent qu’ Israël a été créé en réponse au génocide et qu’il n’ est pas juste que pour résoudre un problème européen on donne des terres arabes. Dans ce schéma les arabes sont des victimes .Le fait que certains israéliens viennent des pays arabes vient compliquer ce schéma .Mes interlocuteurs effrayés devant tant de complexité me disent « mais enfin Jean-Pierre ,reconnais que les arabes étaient bons et chevaleresques et qu’ils traitaient les Juifs avec respect amitié et tolérance »
Comment expliquer que c’est plus difficile que cela ? Comment expliquer que Les Juifs qui ont quitté la Tunisie et dont certains sont partis en Israël n’ étaient pas tous des fous quittant un paradis ?
En 1970 j’ ai été faire mon service de coopérant technique français à l’ hôpital Habib Thameur Je m’ y sentais très bien je faisais de la pédiatrie avec des gens que j’ aimais et qui m’ appréciaient. Mon grand père Enrico Fiorentino y avait été chef de service longtemps avant ma naissance lorsque l’ hôpital s’ appelait hôpital italien ...Un jour, alors que tous les jours tout le monde me saluait gentiment ,je remarque que personne ne m’ adresse la parole on semble vouloir m’ éviter. J’apprendrais quelques heures plus tard qu’il y a eu des bombardements de l’ aviation israélienne au sud Liban
Cette histoire sans parole pouvait s’ interpréter ainsi : »des Juifs ont bombardé un pays arabe, nous arabes ne pouvons pas te saluer toi qui est Juif, nous devons marquer notre solidarité avec nos frères » et dans cette histoire il importait peu que je n’ai pas même pas été au courant de ces bombardements. J’étais au moins pour quelques heures l’ ennemi.

Il y a entre mes condisciples incapables de me distinguer d’ un pied noir d’ une part ; les prétendus pro palestiniens qui imaginent le monde arabe comme paradisiaque d’ autre part et parmi ceux qui en 1970 à l’ hôpital Thameur m’ ont tenu pour complice de bombardements dont j’ ignorais tout un facteur commun :le goût pour la simplification.
Pour ces personnes à la question quand suis je venu en France ? il me faudrait répondre le 15 septembre 1961.Cette réponse simple évacuerait tout contexte, toute vie intérieure , mettrait un terme à toute interrogation et serait compréhensible par tous
Elle est satisfaisante pour ceux qui veulent « en finir » .Moi je préfère témoigner réfléchir et échanger avec ceux qui veulent vivre.

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